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Ambatovy est dans le rouge. La compagnie minière tire la sonnette d’alarme pour dénoncer les mesures assassines dont elle est victime à travers la mise en application du système Advance cargo declaration (ACD).
«Dans les conditions actuelles, Ambatovy ne peut survivre qu’environ une semaine. En l’absence de directives des autorités compétentes pour les compagnies maritimes, leur ordonnant expressément et sans équivoque d’accepter les cargaisons envoyées par Ambatovy et à destination d’Ambatovy, sans exiger les taxes ACD, elle sera contrainte de prendre des mesures extrêmement drastiques avant la fin de la semaine prochaine. En outre, puisqu’on ne peut pas charger les cargaisons qui nous sont destinées, on n’aura plus de matières premières ni de pièces détachées». Ces propos sont de Louis Roland-Gosselin, vice-président d’Ambatovy en charge du développement durable, lors d’une conférence de presse organisée hier au siège de la compagnie à Ankorondrano.
Trésorerie en danger
Depuis maintenant quelques jours, les opérations d’Ambatovy sont donc complètement bloquées en raison des taxes ACD que l’Agence portuaire maritime et fluviale (APMF) impose à la compagnie minière. Des containers de cobalt et de nickel et d’autres produits sont en effet en souffrance au port de Toamasina. De même, les cargaisons de matières premières et de pièces détachées dont la compagnie a besoin pour faire fonctionner ses usines ne sont plus acceptées par les compagnies minières. «Suite au blocage des containers dans le port de Toamasina, Ambatovy n’a plus de revenu. Notre trésorerie qui est déjà fortement perturbée par le prix extrêmement bas du nickel sur le marché international deviendra très critique en peu de temps», a indiqué le vice-président de la compagnie.
Conséquences au niveau international
Ambatovy risque ainsi le pire face à une telle situation si aucune décision n’est prise du côté des autorités responsables. «Mettez-vous à notre place. Plus d’argent dans la caisse, pas de production possible parce qu’on n’a pas de matières premières ni de pièces détachées. Les clients risquent de se détourner de nous et de s’approvisionner ailleurs, d’autant qu’il s’avère inutile de préciser qu’il y a une surproduction de nickel au niveau mondial», lance Louis Roland-Gosselin.
Mais ces problèmes auxquels fait face Ambatovy risquent surtout de prendre une ampleur jamais connue auparavant au niveau international, dans la mesure où la sécurité des investissements à Madagascar est fortement menacée en raison de ces pressions, politiques en l’occurrence, subies d’une manière quasi-générale par les opérateurs en ce moment. Il faut en effet savoir que les actionnaires d’Ambatovy sont constitués par des opérateurs japonais, canadiens ou encore américains qui sont aussi implantés à Washington et sont en relation avec des bailleurs comme le Fonds monétaire international (FMI). Il est ainsi évident que ces tracasseries sont en défaveur du pays, particulièrement dans ce contexte où la quête de financements extérieurs bat son plein.
Appel au chef de l’Etat
Les observateurs alarment également du fait que certaines personnes laissent les intérêts personnels et les mauvaises pratiques prendre le dessus, au détriment de l’économie nationale. De plus, force est de constater que les membres du gouvernement semblent impuissants face à certaines personnes de l’entourage du président de la République qui s’obstinent dans l’adoption de ce système déjà contesté par l’ensemble du secteur privé et bien d’autres parties prenantes. Il semblerait d’ailleurs que ces proches du président aient déjà fait savoir qu’ils ne reculeraient pas dans la mise en application de l’ACD. «Nous avons demandé une réunion d’urgence avec le président de la République car nous pensons que, dès qu’il sera informé de la situation, il veillera à ce que la loi soit appliquée comme il se doit», a fait savoir Louis Roland-Gosselin. Des déclarations qui sous-entendent donc que le président n’est pas au courant de ces mouvements qui se trament autour de lui. Et nombreux s’interrogent si ces actions n’ont finalement pas d’autres visées que de laisser la situation s’envenimer et, à terme, empêcher le président d’être réélu à la prochaine présidentielle…
La LGIM oubliée ?
Pourtant Joéli Valérien Lalaharisaina, ministre auprès de la présidence chargé des Mines et du pétrole a déjà confirmé par écrit aux compagnies maritimes que ces dernières ne devaient pas appliquer les dispositions ACD à Ambatovy en décembre 2015. Et cela est prévu par la Loi sur les grands investissements miniers (LGIM) elle-même qui encadre les activités d’exploitation d’Ambatovy depuis son implantation à Madagascar en 2007. Louis Roland-Gosselin a d’ailleurs précisé à ce sujet qu’«Ambatovy ne peut faire l’objet de dispositions légales ou réglementaires postérieures au décret d’éligibilité de 2007, et qui auraient pour effet d’augmenter les charges fiscales ou douanières que la compagnie doit supporter (…). La stabilité fiscale et juridique dans la LGIM est un facteur décisif qui a conduit les actionnaires d’Ambatovy à investir 8 milliards de dollars».
Or, l’application de la taxe ACD à cette compagnie minière équivaudrait à une dizaine de millions de dollars de coût supplémentaire sur la durée d’installation. «Nous avons un très grand respect pour la loi à Madagascar, et nous sommes très préoccupés par la non-application des dispositions légales aujourd’hui», a conclu Louis Roland Gosselin.
Un désastre économique
Dans tous les cas, une éventuelle suspension des activités de cette grande compagnie minière constituerait un désastre économique pour le pays. En effet, un arrêt de fonctionnement des usines d’Ambatovy pourrait prendre près de quatre à six mois, et autant pour une reprise des activités. La présence de cette compagnie à Madagascar génère également des milliers d’emplois directs et indirects, lesquels se retrouvent en péril. Plus encore, les importations effectuées par Ambatovy représentent un enjeu majeur pour les rentrées de devises, et l’ariary qui a connu une légère stabilité ces derniers mois, risquerait de connaître ses pires moments si la situation perdure.
James R.