
Le tournage d’un film documentaire sur les épaves maritimes de Sainte-Marie semble virer à une sorte de pillage du patrimoine culturel subaquatique du patrimoine national malgache. Le ministère de la Culture a dû suspendre l’autorisation de tournage et prend toutes les mesures nécessaires pour empêcher que des abus ne se produisent.
Le patrimoine culturel subaquatique malgache est menacé. Les épaves maritimes de Sainte-Marie en particulier sont en danger. «Des fouilles non autorisées sont en train de s’y opérer», a confirmé le général Alphonse Dieudonné, coordonateur national de la Brigade anti-piratage et de la protection du patrimoine, un organisme rattaché au ministère de la Culture et de l’artisanat. Témoin de cette situation, ce responsable n’a pas tardé à faire son rapport auprès du ministère de tutelle.
Lors d’une conférence de presse tenue hier dans la salle Rado du ministère de la Culture et de l’artisanat, à Anosy, Brigitte Rasamoelina, ministre de tutelle a dénoncé ce qu’elle qualifie d’exploitation abusive, voire illégale du patrimoine subaquatique malgache, qui se déroule au cœur de l’île touristique de Sainte-Marie, dans la région Analanjirofo.
Pour la petite histoire, October Films, une maison de production britannique représentée par un certain Sam Brown, a obtenu l’autorisation de tourner un film documentaire sur les épaves maritimes de Sainte-Marie. Le tournage devait durer 39 jours. «Dans le protocole d’accord signé le 20 mars dernier, il n’est nullement fait mention de fouilles dans le site et ses environs par respect de la convention sur la protection du patrimoine culturel subaquatique de 2001», a souligné Brigitte Rasamoelina.
Une motopompe
«Ce qui s’est pourtant produit à Sainte-Marie ces derniers temps est que l’équipe de tournage a utilisé une motopompe et a déjà remonté quelques objets issus des épaves maritimes», a témoigné le général Alphonse Dieudonné qui a assisté l’équipe de réalisation du film depuis le début du tournage. Si par accident le tournage et les travaux qu’on y mène feraient sortir des artefacts, ceux-ci devraient être placés et conservés au musée de l’Ilot Madame que l’équipe de tournage devrait rénover, selon les clauses du protocole d’accord que la maison de production et la partie malgache ont signé.
Dans ses arguments, October Films a indiqué que «Comme il a été convenu, October Films a entamé la réhabilitation complète du musée de l’Ilot Madame». Mais les responsables du ministère de tutelle de confirmer que sur le coût des travaux de réhabilitation du musée, une tranche seulement de paiement a été effectuée, le lundi 20 avril dernier. Cette situation n’a pas permis à l’entrepreneur chargé des travaux de se mobiliser.
Suspension de l’autorisation de tournage
Consciente de l’imminente gravité de la situation, la ministre de la Culture et de l’artisanat a jugé bon de suspendre l’autorisation de tournage de ce documentaire. La ministre a également saisi l’organisation des Nations unies pour l’éducation, la science et la culture (Unesco) qui, par le biais de son sous-directeur général pour la culture, Alfredo Pérez de Arminan, n’a pas tardé à manifester sa «grande inquiétude» sur ces «fouilles menées actuellement au large de Sainte-Marie, au mépris des normes scientifiques internationales, et qui menacent l’intégrité des épaves fragiles qui reposent dans les eaux de Madagascar».
«Nous avons réagi selon les textes en vigueur et la convention sur le patrimoine culturel subaquatique de 2001 que Madagascar a ratifiée en février 2014, par le biais du chef de l’Etat. Et dans le respect de l’arrêté interministériel déjà signé auparavant portant sur la protection de la zone de protection des épaves dans le patrimoine national Ilot Madame de l’île de Sainte-Marie. Donc, nous avons agi dans le respect de la bonne gouvernance», a indiqué Brigitte Rasamoelina.
Dans les années 2000, une sorte de pillage de ce patrimoine culturel subaquatique a déjà eu lieu dans ce patrimoine national de l’Ilot Madame. Des pièces d’or, des canons, des boulets… ont déjà été sortis illicitement de la Grande île. «C’est pour protéger justement les richesses que recèle ce site que nous avons décidé de prendre cette décision», a souligné la ministre.
Vonjy M.