
En pleine période de réception des dossiers de candidatures aux prochaines élections municipales et communales par l’Organe de vérification et d’enregistrement des candidatures (Ovec), des flous persistent sur certains points importants. Non seulement le fondement des élections de proximité est remis en cause, mais la décentralisation effective tant prônée par le régime risque de ne pas avoir les bases solides exigées. En fait, les décisions politiques prennent souvent le pas sur les démarches juridiques qui doivent normalement être entreprises pour une conformité à la loi.
La nomination des préfets de région, toujours attendue
Le conseil des ministres spécial pour la nomination des préfets dans les 22 régions tarde à se tenir après un premier report. Depuis l’ouverture du dépôt des dossiers de candidature à la course à la mairie d’Antananarivo, et même partout à Madagascar, il y a un peu plus d’une semaine, aucun candidat ne s’est encore manifesté pour concrétiser sa participation aux élections, l’organisation de celles-ci étant particulièrement boiteuse. Pour rappel, il appartient aux préfets de région de se prononcer sur le nombre de conseillers municipaux à élire dans chaque commune. Ils accompagnent ainsi le candidat-maire dans son scrutin de liste pour être élu avec lui. Arrêté au nombre de 55 pour la Commune urbaine d’Antananarivo (CUA), les candidats ont préféré gardé le silence. A noter que c’est la loi électorale elle-même qui impose la détermination du nombre des conseillers municipaux à élire par les préfets de région. Dans les coulisses, on parle de la difficulté pour le pouvoir de nommer des personnalités à la hauteur de ses ambitions, avec le risque de revenir brusquement sur la décision dans le cas d’un dérapage politique majeur. Une erreur qui risquerait d’être fatale pour le régime. Le temps reste pourtant compté jusqu’à la fermeture du dépôt des dossiers de candidature, le 7 mai prochain. Parmi les critères à prendre en compte, selon toujours la loi, les préfets de région doivent être des administrateurs civils. Là encore, les personnalités à nommer ne sont pas nombreuses.
Des maires suspendus…
La décision intervient au moment même où les procédures sont enclenchées pour leur remplacement légal en vue des élections de proximité. Plus d’un observateur se demande les raisons qui ont fait que les suspensions des maires d’Alasora et de Sabotsy Namehana aient été aussi urgentes. La décision est tombée comme un couperet, il y a quelques semaines, entraînant même des mouvements de foules. Candidats indépendants à la mairie de leur commune respective en 2007, Avotra Andriamosa, maire d’Alasora, et Andriamihaja Benarivo, maire de Sabotsy Namehana ont été relevés de leurs fonctions dans des conditions floues pour l’ensemble de l’opinion. Plusieurs raisons qui ne sont pas récentes ont été évoquées pour soutenir la décision, lorsque les observateurs tablent sur une stratégie politique adoptée par le régime en vue des prochains scrutins. Les témoignages font part d’un refus d’intégrer le parti HVM, tandis que de son côté, le maire d’Alasora prévoit une participation sous la bannière « indépendant » aux prochaines élections municipales. Le maire de Sabotsy Namehana, quant à lui, n’a eu de cesse de rappeler son origine, qui est aussi celle du président de la République. La suspension des deux maires est moins compréhensible lorsque l’on sait que leur mandat de 4 années, depuis 2007 a été prorogé. Non remplacés par des présidents de délégation spéciale (PDS), ils ont vaqué à leurs occupations pendant une longue période, non déterminée par la loi en vigueur. D’autant plus que cette suspension est perçue comme une entrave aux choix des citoyens des communes concernées alors qu’ils ont, il y a plus de 5 ans, voté pour ces personnalités au suffrage universel direct. A noter également que les maires et autres agents administratifs doivent quitter leurs postes un jour avant le dépôt des dossiers de candidature auprès de l’Ovec de leur circonscription électorale s’ils comptent entrer dans la course pour les élections municipales et communales. Pour les deux communes, la question de savoir si de nouvelles personnalités seront nommées ou si l’enjeu majeur est les élections du 31 juillet prochain reste sans réponse.
Des chefs-fokontany juridiquement inexistants
Eléments majeurs dans l’organisation des élections de proximité, le cas des chefs-fokontany n’est pas à prendre à la légère. Un statut juridique définit les rôles et les responsabilités des communes, sans aller au plus bas de l’échelle, en l’occurrence les fokontany à faire tourner la plus petite collectivité décentralisée. Pourtant, les listes électorales à la base de toutes consultations populaires sont révisées par chaque citoyen à la base. Sur le fonctionnement administratif, ils demeurent incontournables pour toutes les démarches, tandis que leur reconnaissance sur le plan juridique demeure un obstacle majeur. N’ayant d’autre source de revenu que les droits de délivrance des documents qu’il doit réaliser comme les certificats de résidence ou encore les divers « dina », le fokontany se doit pourtant de tout reverser à la commune avant une nouvelle répartition budgétaire et une part salariale définie. Non seulement la procédure prend du temps, mais elle ralentit le fonctionnement d’une petite administration qui pourrait pourtant être foncièrement indépendante autant sur le plan des ressources humaines que d’une partie des ressources financières. Malgré des réclamations des acteurs politiques sur un rôle majeur à jouer par les fokontany dans la mise en place d’une décentralisation effective, leur cas reste tabou au sein de l’Assemblée nationale qui ne prévoit aucun statut juridique clair à l’endroit des fokontany. Pour rappel, le salaire des chefs-fokontany et des employés de ces petites circonscriptions, qui ont une influence majeure sur les élections de proximité sont dérisoires. Les observateurs politiques craignent une nouvelle manipulation de ces derniers face à une organisation électorale imprécise et sujette à de nombreux points qui restent à éclaircir.
Soa R.